Une étude révèle la présence massive de pesticides dans la pluie en France
Selon une étude récente menée au sommet du puy de Dôme, en Auvergne, des scientifiques ont identifié la présence massive de pesticides dans les nuages survolant la France. Certaines de ces substances sont pourtant bannies depuis des années. Cette découverte met en lumière une pollution atmosphérique jusque-là méconnue et interroge sur ses conséquences pour la santé, la biodiversité et la gestion de l’eau.

Des nuages chargés de pesticides : une réalité mesurée en Auvergne
L’étude, pilotée par l’Université Clermont-Auvergne, a été réalisée à 1 500 mètres d’altitude au sommet du puy de Dôme. Les chercheurs ont utilisé un dispositif innovant, surnommé “aspirateur à nuages”, permettant de recueillir des échantillons sur plusieurs saisons.
Les analyses, publiées dans la revue scientifique Environmental Science & Technology, révèlent la présence de 32 substances pesticides dans les microgouttelettes des nuages. Ce cocktail inclut des herbicides, des insecticides et des fongicides, parfois interdits depuis plus de dix ans comme l’atrazine (proscrite en France dès 2003). Parmi ces produits, certains demeurent autorisés dans des pays voisins, ce qui favorise un phénomène de pollution transfrontalière.
Comment les pesticides voyagent-ils jusqu’à nos nuages ?
Le parcours des pesticides dans l’atmosphère repose sur le cycle de l’eau. Lorsqu’ils sont appliqués sur les sols agricoles, une partie de ces produits chimiques s’évapore avec l’eau. Ces molécules sont ensuite captées par les masses d’air et transportées sur de longues distances, jusqu’à s’intégrer aux nuages.
En conséquence, il peut “pleuvoir des pesticides”, y compris dans des régions pourtant éloignées des zones agricoles. Ce phénomène explique la présence de polluants dans les sols, les rivières ou encore la biodiversité locale, même dans des zones où l’usage de ces substances est rare ou inexistant.
Des concentrations préoccupantes pour la santé et l’environnement
Les résultats montrent que la moitié des échantillons analysés dépassent les normes européennes pour l’eau potable. Cette contamination chronique n’est pas sans conséquences :
- Pour l’humain : exposition à de faibles doses de pesticides pouvant provoquer des troubles endocriniens, des effets cancérogènes ou des atteintes neurologiques.
- Pour les écosystèmes : menace pour les insectes pollinisateurs, les poissons et les amphibiens, déjà fragilisés par d’autres sources de pollution.
- Pour les régions éloignées : la pollution voyage au gré des vents, affectant des territoires non utilisateurs de pesticides.
Selon Angelica Bianco, chercheuse au CNRS et autrice principale de l’étude, “c’est la preuve que ces substances voyagent très loin, portées par les vents”.
Quel cadre réglementaire et quelles solutions envisager ?
La persistance de pesticides interdits interroge sur l’efficacité des régulations actuelles. Le maintien de substances autorisées dans certains pays voisins favorise leur circulation transfrontalière. Les chercheurs appellent à :
- Renforcer la coordination européenne sur la surveillance et l’encadrement des usages de pesticides.
- Mettre en place un suivi régulier de la pollution atmosphérique et de l’eau de pluie.
- Privilégier les pratiques agricoles alternatives pour réduire la dépendance aux produits chimiques.