Actualités météo | Littoral français : des pesticides et médicaments retrouvés sur toutes les côtes, de la Baie de Somme à la Corse
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Littoral français : des pesticides et médicaments retrouvés sur toutes les côtes, de la Baie de Somme à la Corse

Publié par Sandrine Météocity , le 18 oct. 2025 à 12:36

Le littoral français, de la Baie de Somme jusqu’à la Corse, est aujourd’hui touché par une contamination généralisée aux pesticides et médicaments. Selon une vaste étude menée par l’Ifremer, en collaboration avec l’unité mixte de recherche EPOC (Université de Bordeaux, CNRS) et financée par l’Office français de la biodiversité (OFB), aucune portion de côte n’échappe à ces polluants chimiques.

Plage du nord de la France

Une contamination généralisée sur tout le littoral français

L’étude Emergent’Sea, menée par des experts de l’Ifremer et de l’EPOC, a compilé plus de 11 300 résultats d’analyses de 2021 à 2023. Les prélèvements, réalisés sur tout le littoral — de la Manche à la Méditerranée et jusqu’à la Corse —, ont ciblé l’eau de mer ainsi que des mollusques comme les huîtres et les moules.

Les chiffres sont sans équivoque : 77 % des substances recherchées ont été détectées au moins une fois dans l’eau de mer, et 65 % dans les mollusques. En moyenne, chaque point de suivi présentait 15 substances chimiques différentes dans l’eau, et ce nombre pouvait atteindre 28 dans certaines zones. Les coquillages, eux, en contenaient généralement 10 en moyenne.

Comment expliquer une telle omniprésence ? Même les scientifiques s’étonnent de cette pollution étendue, signalant que chaque site étudié montre des traces de contamination.

Des polluants détectés jusque dans les zones les plus isolées

La contamination ne se limite pas aux littoraux proches des estuaires ou des zones urbaines. Les scientifiques ont trouvé des traces de pesticides et médicaments jusque sur l’île d’Ouessant, au large du Finistère, pourtant isolée des principales sources de pollution terrestre. Sur cette île bretonne, deux substances pharmaceutiques et quinze pesticides différents ont été mesurés.

Ces résultats démontrent que la pollution chimique est capable d’atteindre les endroits les plus reculés, probablement portée par les courants marins, l’atmosphère ou via la chaîne alimentaire marine.

Quels polluants retrouve-t-on le plus souvent ?

Dans l’eau de mer, les substances retrouvées en plus grande quantité sont :

  • Des herbicides (produits chimiques destinés à éliminer les plantes indésirables, utilisés en agriculture), dont l’atrazine, interdite en Europe depuis plus de vingt ans.
  • Des métabolites de pesticides (résidus issus de la dégradation des substances actives, parfois aussi toxiques que les molécules d’origine), comme ceux du métolachlore.
  • Des résidus de médicaments, notamment le paracétamol.

Dans les mollusques, la contamination est principalement due aux herbicides et aux produits antifouling (peintures spéciales appliquées sur les coques de bateaux pour empêcher le développement d’organismes marins, et limiter la corrosion et l’encrassement).

Quels enjeux pour l’environnement ?

Cette campagne inédite propose un état des lieux détaillé de la pollution chimique sur les côtes françaises. Toutefois, la question des conséquences reste ouverte. Les spécialistes de l’Ifremer insistent : il faut établir des seuils d’effets pour déterminer à partir de quel niveau ces substances nuisent aux écosystèmes marins.

Un autre défi réside dans l’analyse des effets cocktails : il s’agit des interactions entre différentes substances chimiques présentes en même temps dans l’environnement. Ces « effets cocktails » peuvent amplifier la toxicité globale, même si chaque produit, pris isolément, est présent à faible dose — un phénomène encore mal compris par la science.

Enfin, le changement climatique pourrait accentuer la dispersion de ces polluants, en modifiant les précipitations, les courants marins ou la fréquence des crues. Cela complique la gestion et la prévention de la pollution du littoral à l’avenir.