Une station des Pyrénées veut construire un bassin de 2 hectares pour produire de la neige, les écologistes s'indignent
La station des Angles, dans les Pyrénées-Orientales, veut construire un bassin artificiel pour assurer de la neige à ses visiteurs jusqu’en 2050. Ce projet soulève des questions majeures sur l’avenir du ski face au changement climatique, alors que les conflits d’usage de l’eau se multiplient dans la région.
Un bassin pour sécuriser la neige artificielle face au climat
Dans le contexte d’hivers plus doux et de chutes de neige en baisse sur l’ensemble des Pyrénées-Orientales, la station des Angles veut anticiper. Le projet consiste à aménager, au sommet du roc d’Aude, une retenue collinaire d’une capacité de 113 000 m³, couvrant 2,23 hectares à plus de 2 300 mètres d’altitude.
L’enjeu ? Pouvoir produire de la neige de culture chaque hiver et maintenir le flux de visiteurs, sur lequel repose l’économie locale. Pour la municipalité, cette infrastructure serait décisive pour l’avenir de la station et la survie du tourisme hivernal à l’horizon 2050. Le maire, Michel Poudade, défend une solution qui, selon lui, doit « assurer la pérennité du domaine skiable » dans un environnement devenu incertain.
Ce bassin, alimenté par le ruissellement ou la dérivation de petits torrents, se distingue des méga bassines agricoles : il ne puiserait pas directement dans les nappes phréatiques. Outre l’approvisionnement des canons à neige, il pourrait servir en cas d’incendie, pour l’abreuvement du bétail ou même la production d’hydroélectricité. La commune met en avant ce caractère polyvalent pour justifier l’investissement.
Une fracture écologique et sociale sur la gestion de l’eau
Le projet ravive les tensions entre développement touristique et protection de la nature. Plusieurs associations écologistes dénoncent l’implantation d’un grand bassin en plein cœur du parc naturel régional des Pyrénées catalanes, une zone déjà fragilisée par la sécheresse. Marc Maillet, président de FRENE 66, considère qu’il s’agit d’une réponse inadaptée à l’évolution du climat, accusant les décideurs de ne pas prendre la mesure des changements en cours.
Les défenseurs de l’environnement insistent sur l’impact pour la biodiversité locale et sur la pression accrue exercée sur une ressource hydrique qui se fait rare. Ils soulignent aussi que la neige de culture ne peut être produite que si les températures restent suffisamment basses, condition de moins en moins garantie avec la hausse des moyennes annuelles.
L’association FRENE 66 réclame l’abandon du projet et n’exclut pas un recours devant le tribunal administratif si les travaux reprennent au printemps 2026. Cette opposition s’inscrit dans un mouvement plus large de contestation autour de l’artificialisation des espaces naturels en montagne, le dossier des Angles devenant un symbole des contradictions du modèle de développement local.
Entre économie locale et adaptation climatique : un modèle en tension
Garantir la viabilité économique de la station de ski reste la priorité pour la municipalité et les acteurs du tourisme. Les Angles, comme d’autres stations en Occitanie, misent sur la neige de culture pour prolonger leur attractivité.
Les écologistes alertent sur le risque de voir ces infrastructures devenir rapidement obsolètes si le climat continue de se réchauffer. La production de neige artificielle dépend de paramètres stricts : température, disponibilité de l’eau, acceptabilité sociale. Plus la ressource se raréfie, plus les conflits d’usage risquent de s’accentuer, que ce soit avec les agriculteurs, les riverains ou les gestionnaires des espaces naturels.
L’affaire des Angles pourrait servir de cas d’école pour les débats à venir sur le partage de l’eau, et sur le choix de modèles touristiques plus sobres en ressources naturelles.